« Mon film n’est pas israélien, et moi non plus. Je suis ukrainien, et ma décision n’est pas basée sur ma nationalité, mais sur les principes que j’ai suivis toute ma vie. Je suis fermement convaincu qu’on ne peut pas juger une nation et que nous jugeons les gens par leurs actions, pas par leurs passeports », – le réalisateur ukrainien Alexandre Rodnianski, quatre fois nominé aux Oscars.
Le réalisateur ukrainien s’est opposé à la « culpabilité collective »
Le réalisateur et producteur ukrainien Alexandre Rodnianski a annoncé sa décision de retirer son nouveau film documentaire Notes of a True Criminal du prestigieux Festival international du film documentaire d’Amsterdam (IDFA) (13 – 24 novembre 2025). La raison en est la décision des organisateurs du festival d’exclure les sociétés de production et fonds israéliens « recevant un financement public ».
Rodnianski a annoncé sa décision dans un message personnel publié sur les réseaux sociaux. Sa position était très claire : il n’est pas d’accord avec l’idée de responsabilité collective et considère qu’il est inacceptable de boycotter l’art uniquement sur la base de son appartenance nationale.
Le geste de Rodnianski est particulièrement symbolique, car il est un réalisateur d’un pays qui mène lui-même une guerre défensive contre un agresseur terroriste — la Russie.
Les Ukrainiens, peut-être plus que quiconque, comprennent les Israéliens : Israël se bat aussi pour son existence — contre le Hamas et d’autres forces qui déclarent ouvertement vouloir détruire à la fois Israël et l’Ukraine.
Et bien que le gouvernement israélien « fasse preuve de retenue » et ne « voit » pas la Russie comme un agresseur direct, la société israélienne voit de plus en plus clairement à quel point les destins des deux pays sont similaires — ceux qui se défendent contre le mal venant sous différents drapeaux.
« Je ne suis pas d’Israël, mais je suis contre ce principe »
Dans sa déclaration, le réalisateur a souligné qu’il n’a pas agi par solidarité nationale, mais par principe :
« Mon film n’est pas israélien, et moi non plus je ne suis pas d’Israël. Je suis ukrainien, et ma décision n’est pas basée sur la nationalité, mais sur les principes que j’ai suivis toute ma vie. Je suis convaincu qu’on ne peut pas juger les peuples. Nous jugeons les gens par leurs actions, pas par leurs passeports ».
Selon Rodnianski, les réalisateurs israéliens sont connus pour critiquer souvent la politique de leur propre gouvernement et de l’armée, et ce sont précisément leurs voix qu’on essaie de faire taire.
« Israël est un pays démocratique. Les institutions que l’IDFA boycotte sont financées par des sources publiques, mais la répartition des fonds est gérée par des comités indépendants. L’État ne contrôle pas la plupart des projets documentaires, et souvent c’est lui qui essaie de les censurer — les mêmes films que le festival exclut maintenant ».

« C’est de l’hypocrisie »
Rodnianski a qualifié la décision de l’IDFA de « pratique hypocrite » et de « procédé hypocrite » utilisé à des fins politiques.
Il a rappelé que dans la plupart des petits marchés cinématographiques — qu’il s’agisse de l’Europe de l’Est ou du Moyen-Orient — le financement public est un soutien vital pour l’art, et non un outil de propagande.
« Interdire la participation d’institutions simplement parce qu’elles reçoivent un financement public, c’est de l’hypocrisie. En réalité, le cinéma dans les petits pays ne survivra tout simplement pas sans une forme quelconque d’aide publique ».
À titre d’exemple, il a cité plusieurs films anti-guerre célèbres réalisés avec le soutien de fonds israéliens : « Liban », « Foxtrot », « Valse avec Bachir », « Synonymes », « Le Genou d’Ahed » et « Oui ».
« Ces films ont été financés par l’État d’Israël, mais cela ne les rend pas moins puissants et critiques », a souligné le réalisateur.
Une position à contre-courant
La décision de Rodnianski a été remarquée non seulement en Israël, mais aussi dans la critique cinématographique internationale. Son geste est un exemple rare où un réalisateur de renommée mondiale défend les artistes israéliens face à la pression croissante sur Israël de la part de plusieurs institutions culturelles.
La publication de Rodnianski a suscité une grande réaction dans le milieu professionnel. Beaucoup ont noté que ses arguments concernent non seulement la situation israélienne, mais aussi le principe même de l’existence du cinéma indépendant dans un monde où la politique pénètre de plus en plus dans le système des festivals.
La frontière légale et éthique
Le réalisateur a également mentionné la position de l’organisation « UK Lawyers for Israel », qui a récemment envoyé un avertissement juridique contre le boycott des institutions cinématographiques israéliennes, le qualifiant de violation de la loi britannique sur l’égalité (Equality Act).
Rodnianski a noté que la législation britannique peut ne pas s’appliquer en dehors du pays, mais le principe lui-même est universel :
« C’est l’idée qu’on ne peut pas exclure des personnes et des organisations sur la base de leur nationalité, de leur appartenance ethnique ou de leur religion. C’est un principe qui rejette l’idée même de culpabilité collective. C’est simple ».
Réaction en Israël
Comme le rapporte Israel Hayom le 5 novembre 2025, la décision de Rodnianski a eu un large écho dans l’industrie cinématographique israélienne.
De nombreux réalisateurs et producteurs ont qualifié son geste d’exemple de solidarité professionnelle et humaine.
Sur fond de discussions politiques sur les boycotts culturels, ce cas est devenu pour les Israéliens un rappel que la lutte pour la liberté de l’art n’est pas une lutte entre pays, mais une lutte de principes.
Les représentants des sociétés de production israéliennes exclues de l’IDFA, y compris DOCAVIV, CoPro et le diffuseur public Kan, ont exprimé leur gratitude au réalisateur pour son soutien. Pour eux, cette décision est un signe que la communauté professionnelle mondiale comprend qu’il ne s’agit pas de politique, mais du droit de l’artiste à être entendu.
Qui est Alexandre Rodnianski
Alexandre Rodnianski est un réalisateur, producteur et manager des médias ukrainien, l’un des représentants les plus connus du cinéma post-soviétique dans le monde. Né à Kiev, il a terminé l’Institut théâtral de Kiev nommé d’après Karpenko-Kary, et a commencé sa carrière comme documentariste.
Dans les années 1990, il a créé la chaîne de télévision ukrainienne « 1+1 », et a ensuite travaillé comme producteur de longs métrages qui ont reçu une reconnaissance internationale. Parmi eux, « Le Retour » et « Léviathan » d’Andreï Zviaguintsev, « Elena », « L’Exil » et d’autres projets, souvent nominés aux Oscars.
Rodnianski est un quatre fois nominé aux Oscars, lauréat des festivals de Cannes, Berlin et Venise.
À propos du film Notes of a True Criminal
Le film documentaire Notes of a True Criminal a été réalisé par Alexandre Rodnianski en collaboration avec le réalisateur ukrainien Andrei Alferov.
Le travail sur le film a duré presque trois ans. Il repose sur une combinaison unique d’histoires contemporaines de la guerre en Ukraine et de matériaux d’archives filmés par Rodnianski lui-même dans les années 1980-1990, ainsi que des images de son grand-père — opérateur et documentariste du studio « Ukrkinochronika ».
Le film montre que la guerre ukrainienne n’est pas un épisode des dernières années, mais une expérience multigénérationnelle de lutte et de mémoire, reflétant comment le pays est contraint de défendre à nouveau et encore son droit à l’existence contre un « voisin » agressif.
Les réalisateurs abordent ce thème à travers les destins de gens ordinaires, dont les décisions personnelles deviennent le reflet du drame national.
Notes of a True Criminal est une réflexion sur la conscience, le devoir et le prix de la vérité, où la documentalité se combine avec une vision philosophique de la modernité.
Sur le marché international, le film sera représenté par la société Cinephil, l’une des principales plateformes de distribution de films documentaires.
Le programme ChatGPT a dit :
Le cinéma contre les boycotts
La position de Rodnianski n’est pas basée sur la politique, mais sur l’éthique professionnelle.
Il insiste : le boycott des institutions publiques soutenant le cinéma punit en fait les artistes eux-mêmes — ceux qui s’opposent le plus souvent au pouvoir et cherchent la vérité.
Cette approche, selon le réalisateur, détruit l’idée même de dialogue culturel sur laquelle repose le cinéma documentaire.
« Ce n’est pas une défense des valeurs, mais une substitution de concepts. Si l’on exclut les gens à cause de leur passeport, ce n’est pas de la justice, mais une forme de discrimination ».
Contexte large
La situation autour de l’IDFA a suscité un débat sur les limites de la morale dans l’art.
D’un côté, le désir des festivals d’affirmer leur position sur les questions des droits de l’homme. De l’autre, le risque que la morale devienne une forme de censure.
Le geste de Rodnianski a rappelé que l’art n’existe pas pour diviser, mais pour dialoguer.
Lorsque les filtres politiques remplacent les critères artistiques, la culture perd son indépendance.
Conclusion
La décision d’Alexandre Rodnianski n’est pas simplement un acte de protestation, mais une tentative de redonner du sens au mot « principe ».
Le réalisateur ukrainien a rappelé au monde que la culpabilité collective est une illusion dangereuse, et qu’un artiste doit être jugé non par son passeport, mais par sa conscience.
« C’est simple : on ne peut pas juger les nations. Nous jugeons les gens par leurs actions, pas par leurs documents », a-t-il écrit à la fin de son post.
NANouvelles Nouvelles d’Israël Nikk.Agency 6 novembre 2025.
